Patrick Eliès
Auteur, compositeur, interprète

Originaire de Brest, Patrick Eliès démarre sa carrière en 1967 avec la sortie d'un premier 45 tours, il est alors âgé seulement de 17 ans.
Cinq années plus tard, en 1972, il rencontre Georges Brassens qui apprécie ses chansons, l'encourage et le recommande à Louis Nucera, directeur artistique chez Philips (voir courrier adressé à celui-ci ci-contre).
Depuis Patrick Eliès se promène avec sa guitare pour semer à l'entour sa sensibilité et ses tourments mêlés à ceux de l'Océan ...



Lien Social N°193, 10/12/1992

Le 12 octobre dernier (ndlr: 1992) au théâtre Clavel à Paris, Patrick Eliès nous a offert, à l'occasion d'un récital unique, une soirée d'une qualité rare. Ce genre d'évènements n'est, hélàs, pas de ceux dont on parle habituellement à la télévision, ni dans les journaux, pourtant je voudrais présenter dans Lien Social ce breton qui sait si bien chanter sa poésie.

Poète exilé dans un monde dévitalisant de grisaille, de bétons et de métros, Patrick Eliès, que son chant soit d'amour, de tendresse, d'humour ou encore de nostalgie, chante cependant avant tout l'espoir.

Dans cette chanson intitulée Chronique d'un gars ordinaire, il met en scène, en face d'un scoop médiatique sensationnel: la découverte "du cadavre de Monsieur Personne" dont la presse assure que "même les chiens ça les étonne", le suicide discret d'un gars dont la gentillesse était, pour tous ceux qui l'avaient connu, une denrée très ordinaire. "Pauvre Martin, pauvre misère" avait chanté Brassens un peu sur le même thème, Brassens à qui, justement, Patrick Eliès un Adieu Georges remarquable, né d'une rêverie dans le cimetière marin de Sète.

Que sa poésie chante les hauts ou les bas de la vie, ce sont surtout les efforts constants pour remonter des bas vers les hauts qui y sont exprimés. Parfois la remontée est joyeuse, voire rigolarde: "donnez-moi un kilo d'amour, j'ai envie de revoir le jour" ; parfois elle est d'issue plus incertaine ; ainsi dans Petite fille, chante-t-il "...la mort qui passe avec sa faux me fait des signes et je délire ; je ne sais plus les mots qu'il faut, pour faire éclore ton sourire" ... et plus loin encore: "J'essayerai de tuer le temps, sans faire de chassés-croisés".
L'amour, chez lui, est parfois tout en tendresse, ainsi dans Marie, mais l'amour-passion peut éclater aussi chez ce breton nullement chauvin, à Mons, dans les Flandres et le voici amoureux de ce pays "...on dit que votre ciel est gris, que tout est plat et que tant-pis" (...) mais "C'est ici qu'un jour j'ai perdu le nord, avec les Flandres pour décor".
De sa nostalgie inguérissable de l'enfance, Patrick Eliès nous donne un très tonique "Passé, cassé" qui vaut bien, à mon sens, tous les "Mistrals gagnants d'un Renaud. Bref, original et personnel, son chant est une bouffée d'oxygène dans la grisaille actuelle des pluies acides.

Tout ceux qui l'ont entendu, admirablement accompagné au clavier et à la guitare par Gérard Guilloury, ce 12 octobre dernier au théâtre Clavel à Paris, ne sont pas prêts de l'oublier et attendent avec impatience son prochain récital.

Pierre Riviere